La célèbre « Lettre au père » de Kafka a quelque chose d’universel. Aucune « Lettre à la mère » ne semble avoir la même portée et dire ce que, tous, nous voulons des mères –personnes singulières à qui nous avons appartenu – du moins l’avons-nous cru, ou redouté. Aucune lettre ne dit ce que nous attendons du sentiment maternel qui habite (ou fuit) chacun, homme et femme.
L’amour sans limite que nous avons eu pour nos mères peut-il se délier ? Ou – au fond – ne nous lie-t-il pas au secret, au silence, à l’impossibilité de dire ? Que reste-t-il de nos amours quand les années et la haine, éventuellement, quand l’oubli (est-il jamais possible ?), la déception, la lassitude et la souffrance, les jours anciens, la griffe ou la paix du deuil, quand la représentation maternelle de la mort – on se souvient du rêve de Freud dit « rêve des Parques » –, quand le lointain ou l’immédiat s’en sont emparés ?
Les auteurs de ce numéro ont ainsi accepté de considérer sans trop de précautions ce que sont nos mamans devenues…