Ce numéro met en rapport les théories scientifiques et « la réalité » dont elles parlent, sous un angle bien particulier, déjà en ce que l’une des interrogations ici mises en avant serait celle-ci : est-ce bien de « la réalité » que traitent les théories scientifiques, et dans ce cas de quelle réalité ? Par exemple : la pensée ne peut-elle saisir qu’elle-même ? Plutôt que « la science » elle-même dans ses contenus, ses procédures, ses modes de raisonnement, c’est ici la prise de connaissance qui est questionnée. Ce qui implique, pour les diverses disciplines envisagées, la prise en compte des processus de pensée, et même, de l’ensemble des processus psychiques en jeu quand l’humanité se saisit de son environnement et d’elle-même comme objets, pour les élaborer et les constituer en « sciences », les percevant, les transformant et les construisant, dans divers gestes d’un même mouvement qui serait celui de la théorisation.
C’est pourquoi on trouvera dans ce numéro des titres dont l’orien­tation converge, sans que leurs auteurs se soient concertés et bien qu’ils travaillent dans des disciplines éloignées les unes des autres. Conver­gence qui a trait à la réalité à la fois dans ce qu’elle a d’inatteignable, d’incertain, d’inquiétant — bien que son caractère « réel » et foncière­ment à connaître ne soit pas mis en question — et ce qu’elle a de constitué par la démarche de connaissance elle-même. […]