Lors de la fondation de l’APF en 1964, le paysage éditorial de l’analyse en France a déjà une histoire : une revue existe depuis 1927, la Revue Française de psychanalyse fondée « sous le patronage du Professeur Freud » et financée par de célèbres mécènes. Mais ultérieurement les deux scissions qui divisent à dix ans d’écart le paysage analytique français produisent aussi des effets éditoriaux. La Psychanalyse, publication de la Société française de psychanalyse parait de façon irrégulière à partir de 1956. Huit numéros au total auxquels il faut associer l’existence d’une autre revue, L’Inconscient, fondée à l’initiative d’analystes de différentes sociétés, huit numéros également entre 1967 et 1968. Sensiblement à la même époque, vers 1969, naissent Études Freudiennes, le Coq Héron et Topique,
Quant à la relation de l’APF avec les revues, elle s’inscrit dans cette longue histoire qui se prolonge depuis sa fondation, quand la jeune Association publie le Bulletin de l’APF. Cinq numéros en tout, dont seuls les deux derniers seront en vente libre. L’apparition du premier numéro de la Nouvelle Revue de psychanalyse, au printemps 1970 chez Gallimard, sonne le glas du Bulletin qui fut remplacé par Documents et Débats, bulletin interne réservé aux seuls membres de l’Association. Si, au début de sa parution la NRP indique qu’elle est publiée « avec la collaboration de l’Association psychanalytique de France », cette mention disparaît avec le numéro 39 en 1989.
Depuis 1966, et plus de 30 ans durant, l’APF n’a pas eu une revue spécifique ; mais de nombreuses publications ont accueilli une grande partie des contributions scientifiques d’analystes de l’Association et ont été animées par des comités de rédaction où étaient présents des membres de l’Association et de son Institut de formation. Ainsi, outre la NRP, ont vu le jour L’Écrit du temps et L’Inactuel, Psychanalyse à l’Université, Le Fait de l’analyse ainsi que penser/rêver, les Libres Cahiers pour la Psychanalyse, le Journal de la psychanalyse de l’enfant et la Revue Internationale de psychopathologie.
Dans ces publications apparaît un souci constant, celui d’ouvrir le champ de la psychanalyse à des disciplines proches ainsi qu’à des collègues venus d’autres sociétés. De plus, nombre de membres et d’analystes en formation ont activement participé au comité de rédaction d’autres revues dans le champ psychiatrique, sociologique ou médical. Une mention doit être faite également aux projets éditoriaux soutenus par différentes maisons d’édition et auxquels ont participé des analystes de l’APF, comme auteurs ou comme directeurs de collection.
Puis, parce que nombre d’entre elles avait disparu, à partir de 2007, l’Association édita aux Puf 12 numéros de L’Annuel qui rendirent compte de la plupart des conférences prononcées lors des journées ouvertes de l’Association ou lors de ses Entretiens bisannuels de psychanalyse.
Le Présent de la psychanalyse qui démarre sa publication bisannuelle en janvier 2019 clôt le cycle de L’Annuel.
On le sait dans le mouvement psychanalytique, la question des revues et des collections de livres a toujours été une préoccupation majeure afin que la psychanalyse soit connue et appréciée. Freud n’hésita pas à investir ses propres deniers ou à écrire des textes spécifiques telles les Nouvelles Conférences pour pouvoir aider la diffusion des revues psychanalytiques. La première revue à voir le jour en 1909, Les Annales pour les recherches psychanalytiques et psychopathologiques est plus connue sous son nom allemand de Jahrbuch, elle fut suivie par le Zentrablatt, Feuillet de l’IPA et ensuite Imago en 1912.
Mais aujourd’hui alors que tout laisse à penser qu’Internet a changé la donne, le temps des revues demeure : lire, écrire, échanger restent au cœur de l’activité psychique de l’analyste. Chaque article est le produit d’une chaine qui depuis la sollicitation, la préparation, l’écriture suivie de la discussion avec le comité de rédaction, crée un texte qui ensuite est offert au lectorat pour une lecture, suivie éventuellement d’une discussion.
Le projet du Présent s’inscrit donc dans l’histoire des revues où un temps de la réflexion, plus long que celui de l’actualité et des informations en continu, scande les parutions. En effet, parmi les privilèges qu’offre une revue, celui de pouvoir éprouver les césures, de donner place aux après-coups, de favoriser les errements et la flânerie est précieux : ce privilège nous garantit que le temps ne passe pas en étant soumis à un rythme imposé par autre chose que les plaisirs et les contraintes d’écrire et de lire, héritiers et contemporains du travail de penser. Si un écrit se dévore, parfois un écrit tombe des mains. À charge d’y revenir. Tel est le rythme exigeant et surprenant auquel nous soumet la découverte d’un auteur.
Le Comité de Rédaction