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Le détail
LE DETAIL
Nous savons que de petits signes discrets, surgissant dans le langage, les rêves ou même les dessins, portent en eux une signification cachée qui appelle à l’interprétation. Pour la psychanalyse, un lapsus, une hésitation, l’esquisse d’un geste ou le surgissement d’un fragment de rêve, a priori insignifiants, révèlent toujours un conflit sous-jacent, un désir enfoui, un affect qui cherche à se dire. Le travail du rêve nous l’enseigne, aucun détail n’est jamais anodin ou simplement ornemental : le mot incongru, l’image fugace ou la forme inattendue portent en eux une vérité dissimulée, une voie vers l’inconscient.
Il en va de l’œuvre d’art ou du texte littéraire comme du rêve, où un détail en apparence mineur, son inscription parfois marginale dans un ensemble composé, peut subvertir l’ensemble de la lecture, en déplacer le sens, bouleverser le regard. Il surprend alors comme l’irruption du plus intime, sinon du plus dissimulé, pouvant révéler la trace d’une subjectivité — celle du rêveur, de l’artiste, ou du spectateur lui-même. Dans tous les cas, une fois repéré, le détail attire autant qu’il pourrait repousser, par son pouvoir de disloquer ce qui était tenu pour établi, de faire écart avec le tout et de mettre à jour ce qui se tenait caché.
En séance, le langage de l’analysant est, quant à lui, un tissu de nuances et d’approximations, toujours en quête de formulation. L’altération d’une intonation ou la modulation de la voix, les silences « anodins », les trébuchements et les « petites catastrophes » de l’élocution composent le terreau d’où pourra surgir le sens, un sens parfois diffracté, embusqué, inattendu ou intolérable. Élément visible, manifeste ou discret, le détail peut aussi être invisible, voire se signaler par l’absence de l’attendu. Il est un moment qui fait événement tant dans le tableau, le texte ou la parole, et qui tend irrésistiblement à arrêter le regard et l’écoute, à troubler l’économie de leur parcours.
Élément relégué à l’arrière-plan d’une toile ou dissimulé dans un texte, le détail peut venir en renverser l’équilibre de la composition, quand en psychanalyse, un signe infime peut ouvrir sur le refoulé, fissurer la surface du discours pour laisser entrevoir l’invisible. Mais quand il se met, dans la langue, au service de la quête d’exactitude, quand il vise l’insensé d’une réplique à l’identique de la réalité, il peut aussi être un point de fixation, un lieu de résistance, là où le sujet s’accroche à la répétition, à l’obsession, à une fixation symptomatique.
Ainsi, le détail — en psychanalyse comme en art et en littérature — se révèle ambivalent : à la fois énigme et révélation, barrière et passage, résistance et levier thérapeutique. Il ouvre une brèche vers la vérité refoulée, et permet, dans l’espace transférentiel, l’émergence de transformations subjectives. L’infime, alors, devient l’essentiel.
Conférenciers | Discutants |
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