Accueillir l’autre ?
Que reste-t-il de l’accueil en ces temps de guerre, qui ont tendance à transformer tout autre-différent en ennemi ?
Dans le cours de la vie, l’autre se présente souvent comme « autre que moi », comme étranger ou inconnu vécu comme indifférent ou comme hostile et menaçant. Dans l’accueil qu’il reçoit, le nourrisson, plongé dans la détresse et la « désaide » totale, découvre cet autre comme « proche secourable » avant qu’il ne soit repéré comme un personnage familier. Ces premières expériences de secours devant la détresse seraient, selon plusieurs auteurs, à l’origine de l’éthique.
L’étrangeté de cet autre se présente aussi devant le psychanalyste à travers des symptômes au caractère énigmatique, des demandes inhabituelles (nouvelles pathologies?), ou à travers des expressions culturelles difficilement déchiffrables.
L’« accueil » face à ces demandes non habituelles, consiste à supporter son dérangement et son « étrangement » et à leur faire de la place dans son écoute en ouvrant progressivement un chemin de compréhension. Celui-ci se fait simultanément sur les deux scènes séparées, celle du patient et celle de l’analyste, à travers la forme permise par la scénarisation des contenus psychiques anciens et inconnus de chacun. Ainsi, le travail psychique de l’analyste à partir de ce qui se manifeste dans le dispositif, qui exclut les actes, permettrait-il de découvrir du sens à ce que cet « autre en soi » manifeste en chacun des protagonistes ? Et comment ce travail psychique si fragile, peut-il, aujourd’hui encore, trouver les conditions pour être investi, soutenu et résister à la violence de l’époque ?