Qui interprète ? Comment est-il possible d’interpréter ? D’où se fait l’interprétation ? A ces interrogations classiques il n’est évidemment pas question de répondre ici directement. Les textes qui suivent, chacun avec ses propres détours, montrent avant tout que l’interprétation est une espèce de notion carre ! our qui fait incontestablement partie de l’horizon culturel contemporain. On peut dire que l’interprétation est aujourd’hui un lieu où les confins de la psychanalyse, de la philosophie et de la critique littéraire tendent à se rejoindre, dessinant même un espace dans lequel le travail de la pensée est tout particulièrement sollicité.
Que l’interprétation se trouve au cœur de la théorie et de la pratique psychanalytiques, c’est l’évidence même. Reste pourtant que l’usage qui en est fait, dans un tel contexte, ne saurait laisser intacts ni le terme ni la chose même. Pour avoir été repris par Freud, ce terme reçoit une extension nouvelle qui nous semble aujourd’hui faire problème. Car si, dans le champ psychanalytique, l’interprétation est un mot clé, si elle paraît réaliser une sorte de consensus doctrinal, celui-ci n’est peut-être qu’apparent ou que de pure façade. D’autant plus qu’il ne saurait y avoir, dans la perspective freudienne, de théorie générale de l’interprétation. Un rêve, on le sait, ne devient interprétable qu’à partir des libres associations du sujet, que dans leur suite. Pour devoir être toujours, d’une manière ou d’une autre, rapportée au sujet, l’interprétation devient un geste qui, à chaque fois en quelque sorte, a valeur de commencement. […]
Automne 1983
Revue L’écrit du temps, n° 4, Les Éditions de Minuit Parution : 01-11-1983
SOMMAIRE
Avant-propos Pierre Fédida, La sollicitation à interpréter Laurence Kahn, Un enfant des ténèbres : le mythe Monique Canto, L'amour laconique et les mots du satyre Ettore Perella, Pour une éthique de l'interprétation Jean-Michel Hirt, L'uniforme du désert Michel Gribinski, La part des choses