Les références à la littérature, telles celles bien fréquentes à Shakespeare et bien sûr celle à La Gradiva de Jensen, imprègnent à tel point l’ensemble de l’évolution de l’oeuvre freudienne qu’on ne peut en négliger l’impact auprès de ses lecteurs et successeurs en psychanalyse. La plupart d’entre eux continuent d’écrire et d’analyser avec une pensée ainsi fort imprégnée par les écritures de Freud et des autres cliniciens pionniers et penseurs en psychanalyse, mais aussi par celles de quelques-uns de leurs écrivains familiers et grands compagnons de lecture. Le psychanalyste ne serait-il pas donc intimement habité par l’oeuvre d’un écrivain qu’il privilégie, et qui fertilise ainsi ses propres rhizomes métapsychologiques ?
L’oeuvre littéraire et l’écriture poètique viennent figurer ou mettre en composition des processus psychiques que le psychanalyste explore et découvre également par d’autres cheminenemts, au sein de la cure avec l’analysant, comme a pu l’explorer E. Sharpe,. Ces chemins de pensées différent et pourtant se rejoignent dans leurs quêtes et ouvertures.
Alors « la pensée d’une oeuvre contribue-t-elle à mettre en forme, (…) celle de l’analyse au travail ? Donc celle de l’analysant ?(…) la fiction d’une oeuvre peut-elle s’intégrer au processus analytique et favoriser l’émergence d’une vérité propre à l’analysant ? A l’analyste ? Au transfert ? » ; interrogations que P. Herlem a souhaité rassembler lors d’une journée d’étude, et que nous prolongeons en ce numéro, sur ces questions complexes de compagnonnage et d’entrelacements de pensées avec cet intime proche du psychanalyste qu’est l’écrivain de son choix.
Revue Le Coq-Héron, n° 204, Érès Sous la direction de Mireille Fognini Parution : 17 mars 2011
SOMMAIRE
Entrelacs d'« onirismes narratifs ». Éditorial Mireille Fognini Dossier : Les psychanalystes et leurs écrivains : un maillage intime -Le psychanalyste et son écrivain L'après-coup du colloque en guise d'introduction Kedidja Benarab, Elisabeth Bugglin Ouverture d'une rencontre Nourredine Ben Bachir De la lecture à l'analyse Marianne Alphant Raymond l'Angoisse : penser avec Queneau Pascal Herlem Une lecture de Rainer Maria Rilke Maurice Rey En chemin avec André Du Bouchet « Sur une faille soi-même, s'il se peut, avoir pied » Olivier Paccoud Les cris vains du psychanalyste ou le livre encrypté Ghyslain Lévy Entre les œuvres vives et les œuvres mortes …, une ligne d'ombre Voyages de Joseph Conrad à Sylvie Germain Jean-Baptiste Guillaumin Freud et ses écrivains Freud, la psychanalyse et la littérature Jean-Pierre Kamieniak Freud et Grimm : l'influence d'une lecture d'enfance Monique Totah Freud et Goethe : affinités et souffrances endocryptiques Pascal Hachet En parlant, en écrivant … traiter le réel : une métamorphose ? Lucette Nobs La psychose plus vraie que nature … Ou d'écrire « l'amante en glaise » Monique Selz Artaud : une ligne électrocutée Berta Roth Les identifications d'Arthur Rimbaud Bruno Clavier « Je or vent paix-là ». Un vers mallarméen de Césaire Guillaume Suréna In memoriam Jean-Paul Valabrega : un psychanalyste combattant (1922-2011) Michelle Moreau Ricaud Clinique : paroles, écritures, interprètes Le poème est le patient privilégié. Conséquences pour la construction du cas en psychanalyse Fabio Landa De la Chose, fondement paradoxal de l'Être Philippe Réfabert Écrits d'histoires de pensées et d'histoire de la psychanalyse « My idiotic book » Jacquelyne Poulain-Colombier La psychanalyse à la conquête de l'Ouest : un fléau ? Nina de Spengler Freud avec Halbwachs : les conditions d'une inscription symbolique Annie Topalov Lectures