A l’époque où le visuel tend à envahir le champ des connaissances et à y imposer sa loi, on ne tient compte qu’assez peu, dans la psychanalyse, des mécanismes propres à la pulsion qui s’y trouve associée, et ce malgré l’insistance constante de Freud sur les effets de son pouvoir.
l’exhibitionnisme pervers pose de façon éminente ce genre de question, et il le fait avec une fixité et une persévérance insolites. L’ennui, c’est que le psychanalyste n’est pas nécessairement le mieux placé pour l’entendre : ce n’est pas à lui que le pervers s’adresse ou se fait adresser, sinon pour le braver, le mettre à l’épreuve. Pour éviter le piège, il peut être utile que le psychanalyste se place en position seconde, notamment en tenant compte d’une écoute préalable, celle du sexologue, de l’expert, du juge, etc.
Dans ce premier volume, consacré à des études cliniques, anciennes et actuelle s,, Gérard Bonnet s’est efforcé non seulement d’entendre la question, mais de la déchiffrer plan par plan en tenant compte de ses multiples facettes. Après quoi, il la porte jusqu’au coeur de la découverte freudienne, qu’il réexamine à la lumière d’un symptôme qu’elle a toujours maintenu à distance, non sans quelque raison : c’est ce qui ressort de l’analyse approfondie et détaillée du rêve d’exhibition de Freud qui termine ces études.
Le résultat est assez étonnant : de la pratique exhibitionniste à la pratique analytique, il n’y a pas si loin, surtout là où la théorie tient lieu pour l’analyste de phallus tout-puissant. En ce sens, la cure du pervers est aussi une cure pour l’analyse elle-même, et on peut difficilement dissocier l’analyse de l’exhibitionnisme de l’analyse du processus analytique .