« J’ajouterai simplement que je ne sais pas si vous préférez discuter l’un ou l’autre de ces points ou si vous préférez m’écrire et m’aider à réparer mes torts en me permettant de rejoindre tous ces gens qui, à travers le monde, font un travail que j’ai volé, ou que j’ai simplement ignoré. Je ne promets pas de donner suite à tout, parce que je sais qu’une idée va me venir, et qu’elle est où je suis pour l’instant, et que je n’y peux rien. »
D.W. Winnicott, La Crainte de l’effondrement,
2000, p. 29.
Il n’est pas si fréquent d’entendre les analystes émettre sur eux-mêmes ce genre de critique… Si ce n’est Bion, et son ironie aussi mordante que salutaire… Plutôt narcissiques sur les théories dont ils se réclament, ils en font plus volontiers des chasses gardées que des terres de partage. Ce que nous dit là Winnicott s’illustre dans son propos même : ainsi ces idées qui viennent, à l’image des pensées en attente d’un penseur dont nous parle Bion (1998), justement… Mais s’agit-il d’un « vol », à proprement parler, ou plus simplement de la nécessité de se nourrir de ce qui circule, de s’en ressaisir comme outil dans le décours de l’expérience ? Être psychanalyste contraint à un travail de la pensée qui ne peut trouver sa source que dans le monde ambiant, théorique ou simplement culturel, saisi dans sa diversité, sans pouvoir toujours en pointer l’origine. Notre psyché ne peut-elle s’enrichir d’autre chose que de la vie psychique qui l’entoure ? Winnicott se saisit d’un élément, puis le transforme, dans le prisme de sa manière d’être, en quelque chose qui lui devient propre, qui le caractérise. […]