Le deuxième numéro de L’inconscient qui soit publié sous le titre Clinique et Métapsychologie paraît au moment où prend forme un mouvement de revendication des psychiatres français. Nous ne pouvons que soutenir de toute notre sympathie la légitime exigence de voir cette spécialité médicale accéder à un statut autonome et indépendant de celui de la neurologie. Cependant, nous croyons nécessaire de signaler à l’attention des psychanalystes les Conclusions du Livre Blanc de la Psychiatrie française (1) publiées par le Groupe de l’Évolution Psychiatrique, longue série de résolutions adoptées par voie de référendum et soumises aux pouvoirs publics à titre de motions.
Ce projet d’organisation de la psychiatrie présente la psychanalyse comme une spécialité de la psychiatrie, au sein de laquelle il semblerait d’ailleurs qu’une place éminente lui soit offerte. Une fois la psychanalyse reconnue comme spécialité dans la spécialité il est précisé que rien de ce qui appartiendrait à la psychiatrie ne saurait échapper à son organisation. Si un tel projet était pris au pied de la lettre, il aboutirait nécessairement à une réglementation publique de l’enseignement et de l’exercice de la psychanalyse. Or, on sait qu’une telle réglementation, calquée sur celle qui est nécessaire dans le domaine de la médecine, serait incompatible avec la survie d’une psychanalyse authentique.
Le travail de François Perrier que nous publions ici, et qui n’a pas été inspiré par l’actualité du projet d’organisation de la psychiatrie, nous semble apporter des notions essentielles quant à la spécificité de la cure psychanalytique et à son irréductibilité à tout acte médical ou psychiatrique.
S’il est vrai qu’un important courant d’échanges associe la psychanalyse à la psychiatrie, il reste que ces deux disciplines ne sont pas unies par un lien organique. Une récente publication de Jean Frécourt (2) témoigne de ce que l’on ne saurait être psychanalyste au titre d’une responsabilité psychiatrique. On trouvera dans un prochain numéro les commentaires que ce travail a inspirés à Dominique Geahchan, sur la nature des services que le psychanalyste peut rendre au sein de l’institution psychiatrique. En tout état de cause, ce n’est que de l’extérieur de la psychiatrie qu’il peut y apporter sa compétence.
(1) Conclusions du Livre Blanc de la Psychiatrie française, in L’Evolution psychiatrique, 1967, t. XXXII, p. 919-938.
(2) Le psychanalyste dans l’institution, in Perspectives, psychiatriques, 1967, n° 17, p. 9-14.