L’illusion, pour la philosophie classique comme pour le sens commun, est ce dont l’apprentissage progressif de la réalité nous conduit à nous défier et à nous défaire : elle est faux semblant, opinion fausse, tromperie. Déjà, avec Freud, la psychanalyse restitue pour une part à l’illusion son noyau de vérité. Avec Winnicott, elle fait un pas de plus : entre la réalité extérieure et la réalité interne, il existe un champ intermédiaire, une troisième aire, dite transitionnelle, dont le jeu de l’enfant constitue le prototype. A l’exigence de perdre ses illusions se substitue alors la nécessité de maintenir l’illusion dans ce qu’elle a de créateur.
Des études sur la flatterie, le trompe-l’œil, le théâtre, l’illusion groupale, la fonction du leurre dans le comportement animal complètent ici les travaux proprement psychanalytiques et manifestent toute l’ambiguïté dont est porteur le concept d’illusion, ambiguïté qui a le mérite de troubler nos catégories tranchantes du vrai et du faux, du réel et de l’imaginaire.
Automne 1971
Nouvelle Revue de Psychanalyse, n° 4, Gallimard
Parution : 08-12-1971
SOMMAIRE
J.-B. Pontalis – L’illusion maintenue
D.W. Winnicott – La localisation de l’expérience culturelle
M. Masud R. Khan – Toucher pour voir
Georges Favez – L’illusion et la désillusion dans la cure psychanalytique
Robert Stoller – Création d’une illusion : l’extrême féminité chez les garçons
Didier Anzieu – L’illusion groupale
André Green – L’illusoir ou la Dame en jeu
Jean Starobinski – Sur la flatterie
Jean Rousset – L’illusion théâtrale
Pierre Charpentrat – Le trompe-l’œil
Rémy Chauvin – Le leurre et sa fonction dans le comportement animal
Marc Soriano – Le premier des contes de Perrault ? ou La psychanalyse comme méthode d’authentification