Jusqu’ici nous n’avons pas seulement parcouru le pays de l’entendement pur [les catégories a priori] en en examinant chaque partie avec soin, nous l’avons aussi mesuré et nous avons assigné à chaque chose en ce domaine sa place. Mais ce pays est une île que la nature elle-même a renfermée dans des bornes immuables. C’est le pays de la vérité (mot séduisant), enfermé d’un vaste et orageux océan, empire de l’illusion, où maint brouillard, maints bancs de glace en fusion présentent l’image trompeuse de pays nouveaux, attirent le navigateur parti à la découverte, l’entraînant en des aventures auxquelles il ne pourra plus s’arracher, mais dont il n’atteindra jamais le but.
Emmanuel Kant, Critique de la raison pure
Il est assez rare que l’on puisse dater précisément le début d’une discipline scientifique. Or c’est le cas aussi bien pour la psychanalyse, que pour les sciences cognitives. Le vocable ·« psychoanalyse » fait son apparition en 1896 dans un texte de Sigmund Freud écrit en français sur « L’hérédité et l’étiologie des névroses ». Certes, on est encore loin à l’époque de ce que nous entendons aujourd’hui par « psychanalyse » et il faudra encore des années à Freud lui-même pour préciser sa méthode et en définir l’objet. Il est clair que les analystes n’ont pas, fini de délimiter l’univers de discours de Ieur discipline, autrement dit son domaine de validité épistémologique. Il reste qu’on peut situer la naissance de la psychanalyse au tournant du XIXe et du XXe siècle, notamment au moment où Freud prend conscience de la différence entre « réalité psychique » et « réalité historique » et où il découvre le transfert avec le cas Dora (1905) comme le lieu où s’actualise la réalité psychique du patient. […]